Confrontée aux limites du réseau mobile dans ses trains à grande vitesse, la SNCF s’apprête à révolutionner la connectivité à bord. En lice : Starlink, le réseau satellite d’Elon Musk, et Eutelsat/OneWeb, concurrent européen. Objectif : un Wi‑Fi fluide, stable et accessible dans tous les TGV, même en pleine campagne.
Wi‑Fi TGV : une expérience encore trop inconstante
Le système actuel repose sur la captation de signaux 4G/5G par des antennes embarquées. Mais à 300 km/h, le signal est perturbé par l’effet Doppler, les tunnels, les zones rurales et même par la structure métallique des trains. Résultat : connexions intermittentes, débits faibles et frustration croissante des usagers.
Dans un contexte où le télétravail, le streaming et les communications en ligne sont devenus la norme, les voyageurs attendent bien plus qu’une simple connexion symbolique. Le Wi‑Fi est désormais perçu comme un service essentiel, surtout sur les longs trajets, où il peut transformer le train en bureau mobile ou en salon de divertissement. La promesse d’un Wi‑Fi gratuit et performant est donc plus que jamais une exigence.
Vers une infrastructure hybride : terrestre + satellite
Pour relever ce défi, la SNCF envisage une transformation de fond de son architecture de connectivité. L’idée est de combiner le réseau mobile terrestre avec une couverture satellitaire en orbite basse (LEO), afin de garantir une connexion continue, même dans les zones non couvertes par la 4G.
Des expérimentations sont déjà en cours, afin d’évaluer la viabilité technique de cette solution. Il s’agit notamment de tester la compatibilité des antennes satellite avec les contraintes physiques et réglementaires du matériel roulant. L’objectif est de lancer un appel d’offres fin 2025, pour un déploiement sur les lignes à partir de 2026, voire 2027. Cette combinaison satellite/terrestre permettrait d’atteindre une qualité de service jusqu’ici inaccessible sur le réseau ferroviaire.
Starlink vs Eutelsat/OneWeb : deux visions du Wi‑Fi ferroviaire
Avec plus de 7 500 satellites en orbite basse, Starlink (opéré par SpaceX) est aujourd’hui le leader mondial de l’internet par satellite. Déjà actif dans l’aviation, le maritime et dans certaines lignes ferroviaires comme en Écosse avec ScotRail, Starlink offre une latence réduite, des débits soutenus et une couverture mondiale. La SNCF a été approchée par Starlink pour des tests et étudie sérieusement cette option.
Face à lui, Eutelsat/OneWeb, avec environ 600 satellites, mise sur une couverture européenne et une forte légitimité en matière de souveraineté technologique. L’opérateur franco-britannique bénéficie d’un soutien politique important et discute lui aussi avec la SNCF. Moins puissant que Starlink en termes de nombre de satellites, il pourrait toutefois séduire l’opérateur public par sa proximité institutionnelle et ses garanties de contrôle stratégique.
Une décision stratégique d’ici fin 2025
La SNCF prévoit de formaliser son choix par un appel d’offres structuré d’ici fin 2025. Cette décision cruciale prendra en compte de nombreux critères : qualité de service, débit, latence, robustesse du matériel, compatibilité avec les infrastructures existantes, mais aussi enjeux de souveraineté numérique.
Les défis techniques sont considérables. L’antenne satellite devra être compacte, résistante aux vibrations et aux intempéries, et ne pas interférer avec les équipements de signalisation. Une fois sélectionnée, la solution retenue devra être testée, homologuée et intégrée dans les systèmes à bord, avant un déploiement progressif à l’échelle nationale.
Ce que cela change pour les voyageurs et la SNCF
Pour les usagers, cette transformation annoncée du Wi‑Fi à bord représente une véritable montée en gamme de l’expérience voyage. La promesse : une connexion stable, rapide et sans coupure, accessible tout au long du trajet, même en pleine zone blanche. Cela ouvre la porte à des usages jusqu’ici impossibles en TGV : visioconférences professionnelles, téléchargement rapide, streaming en haute définition.
Pour la SNCF, cette modernisation est aussi un levier de performance. Une connectivité fiable à bord permettra une meilleure gestion des opérations : suivi en temps réel du matériel, diagnostics à distance, communication passagers optimisée, et potentiellement, de nouveaux services embarqués. Le Wi‑Fi devient ainsi un outil stratégique, à la fois pour fidéliser les voyageurs et pour optimiser l’exploitation du réseau.